Nadia
Responsable d'un centre d’essais

Nadia a découvert la mécanique un peu par hasard mais elle y a fait carrière par choix. Aujourd’hui, elle dirige le plus grand centre d’essai sur équipements haute-tension de France. Elle a construit son parcours en portant attention à une chose : son envie.

“Travailler dans la mécanique, ce n’est pas de la provocation. Juste de la détermination.”
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Nadia
Responsable d'un centre d’essais
“Travailler dans la mécanique, ce n’est pas de la provocation. Juste de la détermination.”

Nadia a découvert la mécanique un peu par hasard mais elle y a fait carrière par choix. Aujourd’hui, elle dirige le plus grand centre d’essai sur équipements haute-tension de France. Elle a construit son parcours en portant attention à une chose : son envie.

Qui est Nadia ?

• Nadia est diplômée de l’INSA Lyon qui est classée parmi le top 3,5%* des meilleures universités mondiales.

• Au fil des années, elle s’est passionnée pour la mécanique et le domaine de l’énergie

• Elle travaille depuis 12 ans chez GE VERNOVA, où elle a gravi les échelons.

• Aujourd’hui, elle est directrice d’un centre d’essai de puissance sur matériel haute tension, CERDA Labs

• Elle est à la tête d’une équipe de 50 personnes.

•Son état d’esprit : “Je n’écoute pas le doute des autres.”

* https://www.insa-lyon.fr/fr/classement

Pourquoi avez-vous choisi la mécanique ?

Lorsque j’étais en classes préparatoires à l’INSA, je ne savais pas vers quel secteur me diriger. Il se trouve qu'au fur et à mesure des années, j’ai eu quelques facilités et une bonne appétence pour le domaine de la mécanique. Un jour, un peu par hasard, je suis tombée sur une offre de stage dans le domaine des disjoncteurs haute-tension. Et là, ça a été le coup de foudre, une vraie passion. J'y travaille depuis 12 ans.

La mécanique est une activité historiquement masculine. Comment s’est passée votre intégration ?

C’est vrai que les femmes restent encore largement sous-représentées. Dans ma promotion à l’INSA, nous étions à peine une dizaine sur 150. Il m’est arrivé de percevoir des réticences, parfois diffuses, parfois plus claires. Mais au fond, peut-être inconsciemment, j’avais envie de prouver que c’était possible.

Vous vous êtes sentie soutenue dans cette voie ?

J’ai grandi avec l’idée que tout m’était accessible. Mon entourage ne m’a jamais dit que certains chemins n’étaient pas faits pour moi. Au contraire, ma famille a toujours eu une grande confiance en mes capacités. Alors, naturellement, j’ai avancé sans trop me poser de questions.

C’est pour ça que je pense que l’égalité commence dès l’enfance, par l’éducation. Il faut apprendre aux jeunes filles ce que j’ai eu la chance d’entendre très tôt : qu’elles sont capables, que leurs compétences comptent, et qu’elles ont toute leur place, y compris là où on ne les attend pas.

Vous n'avez jamais fait face à des réticences ?

Certains me demandaient, avec bienveillance : « Tu es sûre ? Tu ne préférerais pas le génie biologique ? Ce sera peut-être plus confortable. » L’idée n’était pas de me décourager, mais plutôt de m’éviter la difficulté d’évoluer en minorité dans un univers très masculin.

Mais moi, j'avais confiance dans le choix que je faisais. Le génie mécanique, c’est une filière exigeante, mais passionnante : elle est partout, elle ouvre des portes dans des domaines très variés, et elle demande une vraie rigueur intellectuelle. C’était ce que j’avais envie de faire, alors je l’ai fait.

Et vous l’avez fait. Sur le site du CNRS où un article vous est consacré, il est écrit : “C'est un peu par provocation que Nadia s'est orientée vers le génie mécanique et la conception.”

C'est le journaliste qui l'a formulé comme ça. Mais ce n’était pas de la provocation, juste de la détermination.

Et dans le monde professionnel, était-ce différent?

J’ai entendu quelques remarques maladroites, du genre : « Les femmes n’ont pas de vision en 3D » ou  «Comment peut-on gérer des enfants en bas âge et être directrice du laboratoire?». Mais au-delà de ces clichés, parfois lancés sur le ton de l’humour, j’ai surtout rencontré des collègues bienveillants. Que ce soit en atelier, sur chantier ou en laboratoire d’essais, je me suis toujours sentie à ma place. J’ai eu la chance d’évoluer dans des environnements professionnels exigeants, mais extrêmement enrichissants, et d’être entourée de personnes formidables qui m’ont soutenue et beaucoup appris.

"Il faut apprendre aux jeunes filles qu’elles sont capables, que leurs compétences comptent, et qu’elles ont toute leur place."

"C’était ce que j’avais envie de faire, alors je l’ai fait."

Être une femme serait-il finalement un atout ?

Je le crois. Tout le monde connaît mon prénom, sans doute parce que nous sommes peu nombreuses. Cela rend le réseau plus facile à construire. Et puis, dans des environnements parfois très compétitifs, j’ai l’impression que ma présence semble parfois apaiser les choses. Je sens aussi que beaucoup d’hommes apprécient cette diversité. Elle fait du bien. Si tu mets des gens qui ont tous le même caractère dans une pièce, au bout d'un moment ça leur fait du bien de voir de la différence. (sourire)

Qu’est-ce que les femmes peuvent apporter à l’industrie ?

De la compétence, tout simplement. Ce n’est pas une question de genre. Ce qui compte, c’est de reconnaître et de valoriser les savoir-faire, d’où qu’ils viennent.

Sur la légitimité des femmes, percevez-vous encore une différence ?

Oui, je le constate souvent. En entretien, un homme se montre généralement très sûr de lui, même s’il ne remplit pas tous les critères. Une femme, en revanche, va souvent chercher à tout maîtriser avant de se sentir légitime. Lorsqu’elle envisage une réorientation, elle pense qu’elle doit d’abord avoir fait ses preuves et démontrer qu’elle est capable, avant même de se projeter vers l’évolution. C’est pareil lorsqu’il s’agit de parler salaire. Les écarts de salaire se jouent déjà dans les prétentions en entretien. Les hommes ont souvent plus de facilité à mettre en avant leurs réussites et à négocier leur rémunération. Les femmes, elles, le font plus rarement — non pas parce qu’elles manquent de compétences, mais parce qu’elles n’ont pas forcément appris à se valoriser ni à faire reconnaître ce qu’elles apportent. Ce n’est pas inné, mais ça peut s’apprendre.

Si vous deviez encourager des femmes à venir dansl’industrie, que leur diriez-vous ?

Ce n’est pas difficile, ce n’est pas infaisable. Les plus grandes barrières, ce sont souvent celles qu’on se met soi-même. Nous avons des compétences et elles sont toutes aussi valables que celles du chromosome XY. (sourire)

"Nous avons des compétences et elles sont toutes aussi valables que celles du chromosome XY. (sourire)"